Atelier de réflexion philosophique: Spinoza et Heidegger – animé par Hichem Daoud et Salima Bisserni

Jeudi 27 février à 18h00

>>> Spinoza : Ethique et Politique (par Hichem Daoud)

L’intérêt de cette communication porte sur un souci philosophique qui a certainement préoccupé Spinoza qui est le suivant : le domaine de l’éthique est un domaine personnel ; il relève de la gouvernance du sujet alors que le domaine politique relève plutôt de la gouvernance d’une communauté. À partir de cette remarque on peut déduire un élément commun qui est la gouvernance, pour Spinoza la meilleure sinon la seule à être acceptée c’est la gouvernance par la raison ; la raison doit gouverner les émotions et les affections du corps par la connaissance des lois qui les gouvernent ; or une méconnaissance de ces lois –qui est l’état de la plupart des gens- conduit à l’illusion suivante : l’homme se croit libre de choisir et de décider de ses actions mais en réalité il n’est que sujet à ses affections du corps et à ses émotions.

La bonne gouvernance de soi commence par une connaissance de l’ordre naturel des choses, il existe des relations de causalité qui comprennent les trois directions : simultanéité, antériorité et postériorité, donc face à cette imbrication de causes et effets l’homme s’attache à l’illusion des universaux, c’est-à-dire il englobe toute l’humanité par sa différence dans un mot générique qui est l’homme ; il ne cherche pas la connaissance singulière des choses singulières.

Et ainsi fonder un ordre politique juste doit passer par cette connaissance de l’ordre naturel des choses, parce que l’Etat n’est qu’un artifice politique, l’autorité exercée sur les citoyens se pose comme nécessaire si les citoyens ne se gouvernent pas eux-même ; mais dans le cas du sujet éthique de Spinoza, la question est plutôt sur l’universalité de cette communauté à partir d’une relation entre les sujets qui respectent la loi qui a été faite par eux-mêmes et qui se respectent entre eux ; il n’y a pas plus utile -selon Spinoza- à l’homme qui se gouverne par la raison que l’homme qui se gouverne par la raison.

Œuvres de Spinoza

  • Éthique, Texte original et traduction de B. Pautrat, Seuil, 1988. Réédition dans la collection Points Essais en 2010.
  • Éthique, Introduction, trad. et notes de Robert Misrahi, PUF, 1990. Réédition en Livre de Poche en 2011.
  • Éthique, traduction et notes de A. Guérinot, IVREA, 1993.
  • Traité Politique, texte latin, trad. de P.F. Moreau, index informatique par P.F. Moreau et R. Bouveresse, Répliques, 1979.

Études sur l’ensemble de la philosophie de Spinoza

  • Ferdinand Alquié, Leçons sur Spinoza, Éditions de la Table Ronde, 2003.
  • Ferdinand Alquié, Le rationalisme de Spinoza, Paris, PUF, 1981.
  • Léon Brunschvicq, Spinoza, Alcan, 1894.
  • Victor Delbos, Le spinozisme, Vrin, 1950.
  • Gilles Deleuze, Spinoza et le problème de l’expression, Paris, Minuit, 1978.
  • Gilles Deleuze, Spinoza, Philosophie pratique, Paris, Minuit, 1981.
  • Jean-Claude Fraisse, L’Œuvre de Spinoza, Vrin, 1978.
  • Alexandre Matheron, Individu et communauté chez Spinoza, Paris, Minuit, 1969.
  • Pascal Sévérac, Spinoza : Union et désunion, Vrin, 2011.

Hichem Daoud

>>> Le vivre ensemble ou la dictature du « On »? martin Heidegger (par Salima Bisserni)

        Le-Dasein, cet être-là, un être au monde, est un être avec d’autres Daseins qui l’étouffent. C’est cela même que Heidegger appelle la dictature du « on ».

Dans la société, en s’interrogeant sur le sens de son être, le Dasein cherche à comprendre lui-même, autrui et le monde. Mais il cherche surtout son propre être et son authenticité. Heidegger pense que « le dasein n’est pas soi – même ».

 Dans la société, il y a une diversité de caractères d’être. Le Dasein dans sa Co existence est un être avec..(mitsein), qu’il est impossible de le déterminer à partir de lui-même. Heidegger dit : « Chacun est l’autre, aucun n’est lui-même. »Dans sa relation avec les autres, le Dasein est en dépendance totale et constante à leur égard. Chaque mode de son être est Co déterminé : « le monde est chaque fois toujours déjà celui que je partage avec les autres ». Le monde du Dasein est donc un monde commun. Le sujet de la quotidienneté est le « On ». Le « On » décharge le Dasein dans sa quotidienneté de toute responsabilité. On est dans l’indifférence où chaque être perd son authenticité et ses particularités. Le moi est sous l’emprise du « On ». La perte de l’authenticité est la déchéance du Dasein.

Selon Heidegger, il n’y a pas de tyrannie plus lourde que cette tyrannie sans tyran. Le « on » retire de chacun toute responsabilité car là où tout le monde est responsable personne ne l’est plus.  Le « on » est son visage. Le on n’est personne, ni celui-ci, ni celui-là, ni quelqu’un, ni la somme de tous.

À quel point peut-on considérer le vivre ensemble comme un phénomène qui prive le Dasein de son authenticité dans le monde ambiant de la quotidienneté ?

Martin Heidegger – être et temps, traduction par François Vezin, Edition Galimmard, 1986.

Salima Bisserni